Être TDAH ou avoir un TDAH?
Vous ne m'en voudrez pas s'il y a des répétitions tout au long de mes articles. Ce n'est pas grave dans le fond. Une idée, ça se travaille et ça se revisite. Je n'ai aucune vérité ni connaissance absolue. Je considère qu'il est dangereux de toujours affirmer, au détriment du "je ne sais pas".
Revenons-en au sujet principal de ce blog, le TDAH.
Je suis récemment tombée sur un commentaire intéressant d'une personne me disant qu'elle n'aimait pas entendre "Je suis TDAH" au lieu de "J'ai un TDAH", ajoutant même:
"Je ne me résume pas à mon trouble!"
Ce propos circule déjà assez fréquemment sur les réseaux.
Certaines personnes le soutiennent, tandis que d’autres affirment
qu’elles "sont" leur TDAH, parce que leur cerveau fonctionne réellement
différemment : leurs particularités neurobiologiques font
intrinsèquement partie de leur manière d’être et de penser.
C'est intéressant, parce qu'au-delà même de la question très technique de ce que le TDAH a à voir avec notre identité, cela questionne, d'une certaine manière, le sens profond de qui nous sommes. Qu'est-ce qui nous définit, qu'est-ce qui peut définir notre identité, notre singularité? Qu'est-ce que c'est que d'être?
Est-ce qu'il y a une vérité et une réponse absolue là-dessus?
Non. Et je ne peux pas donner de réponse linéaire, seulement partager ma pensée.
À titre personnel, je considère que si le cancer ne définit pas qui est une personne, le TDAH non plus. Cependant, le cancer est une maladie, et qui plus est, une maladie qui n'est pas éternelle.
Le TDAH, lui, est un trouble qui est là de notre naissance jusqu'à notre mort.
Dans la mesure où il altère les fonctions exécutives, et qu'il s'accompagne inévitablement d'autres comorbidités variables selon les personnes (l'anxiété, les TOC, troubles psys tels que borderline, bipolarité...), je pense que, d'une certaine manière, le TDAH va façonner qui on est. Parce qu'être neuroatypique, c'est autant voir le monde à travers un prisme singulier que de souffrir d'un handicap. On ne peut pas ignorer qu'on a un TDAH parce que le TDAH gouverne notre vie et on n'a pas d'autres choix que de vivre avec et de trouver des stratégies pour en souffrir le moins possible.
Est-ce que je suis mon handicap? Non. Mais mon handicap façonne voire influence qui je suis.
Mon handicap rappelle ma singularité, mes souffrances, mes différences, ma diversité en tant qu'être pensant, ressentant. Ce qui me pousse à rebondir sur une autre phrase que je vois toujours circuler et que je continue d'entendre:
"Ça va te faire servir à quoi le diagnostic?"
Ce que j'ai remarqué avec mon diagnostic de bientôt deux ans, c'est que le validisme que j'ai subi toute ma vie, je l'ai tellement intégré que je fais encore preuve, à mon égard, d'auto-validisme. C'est extrêmement difficile de s'en décrotter quand personne autour de moi n'a fait l'effort de reconnaître mon handicap (autres que mon compagnon et des ami·es très très proches).
Dur de se valider soi-même quand peu de gens autour de nous ne nous valide.
Ne pas savoir qu'on a un TDAH, c'est être en danger. On le rappelle, le risque de dépression, de comportements à risques est hautement plus élevé chez une personne avec un TDAH non diagnostiquée. Si vous savez que vous avez un TDAH, vous vous retrouvez dans une position où vous n'avez pas le choix: vous devez vous connaître, comprendre votre TDAH. Sinon vous êtes dans la merde.
La médication, les thérapies, sont essentielles. Je ne relancerai pas le débat sur la médication que j'estime obligatoire pour moi-même, certains s'en sortent très bien sans, encore une fois, chaque personne avec un TDAH aura sa propre gestion du trouble qui nécessitera ou non un suivi médical et/ou psy, je sais juste que dans mon cas de figure, je ne peux pas faire sans.
Ne pas savoir, c'est peut-être être en danger. Donc encore une fois, ce n'est pas "juste" un TDAH. C'est un trouble complexe, malheureusement médiatisé avec une légèreté qui me met très en colère, alors que ce trouble nécessite d'être reconnu pour ce qu'il est réellement. Ce n'est pas un super pouvoir. Oui avec un TDAH, on est entiers, sincères, on a un sens du juste décuplé, on est loyaux, on est "trop", on peut déplacer des montagnes, on s'émerveille comme des gosses et on peut même se comporter comme des gosses, mais ça n'est que la partie immergée de l'iceberg.
Derrière, il y a ce que vous ne voyez pas qui peut être extrêmement handicapant: dépression, TOC, anxiété, etc. Je ne me répèterai pas. Donc se diagnostiquer est indispensable.
"Comment faire pour mieux accompagner quelqu'un qui a le TDAH?"
Vous voulez vraiment nous rendre service ? Renseignez-vous sur le TDAH. Pour la partie théorique en tout cas. Lisez des articles scientifiques, consultez le site de la génialissime Lucile Hertzog, faites vos recherches. Ensuite, pour les personnes de votre entourage qui ont un TDAH, montrez-vous curieux. Posez des questions. Demandez-leur comment eux vivent leur TDAH. Ne tournez jamais autour du pot. Allez droit au but. Si vous ne comprenez pas leur attitude, dites-le leur et laissez-leur vous expliquer pourquoi ils fonctionnent ainsi. Ouvrez le dialogue. Gardez en tête une chose pour toute personne souffrant de trouble du neurodéveloppement: nous ne nous adaptons pas au monde, nous nous sur-adaptons à lui. Et nous avons besoin d'être entendu·es et reconnu·es.
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