En finir avec les préjugés sur le methylphenidate (Ritaline)

 


Avertissement : Je ne suis qu’une personne lambda qui émet une opinion et partage ses réflexions et ses connaissances subjectives. Je ne suis pas professionnelle de santé, mais une personne concernée par le TDAH. Cet article a été travaillé avec beaucoup de rigueur mais n'est pas à l'abri de quelques petites erreurs.


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n n'a jamais autant peur, quand on doit prendre un traitement, que lorsque celui-ci touche notre cerveau. Depuis que je suis rentrée dans la démarche diagnostic et médication pour mon TDAH, j'ai lu, entendu et vu de tout mais surtout beaucoup de n'importe quoi.

Le methylphenidate est la molécule dans le médicament qui va travailler sur la régulation des émotions, améliorer la concentration et la motivation entre autres. 
Les différents noms que l'on connait (Ritaline, Concerta, Quasym etc) sont des marques qui proposent des libérations immédiates ou prolongées qui agissent différemment selon les besoins de la personne dans son quotidien. Pour plus d'infos, je vous invite à regarder des informations ici et de découvrir un PDF sur les différentes formules

On entend des gens être réticents et septiques quant à l'usage du médicament, car "c'est une drogue.
Au sens pharmacologique et réglementaire, oui, elle en est une. Le méthylphénidate est classé en France parmi les stupéfiants, au même titre que la morphine ou certains antidépresseurs et anxiolytiques. Il faut savoir qu’en France, pour obtenir une prescription de Ritaline, un bilan cardiaque initial est obligatoire. Le ou la cardiologue, en fonction de votre état de santé, validera ou non la possibilité de commencer ce traitement. Une fois celui-ci prescrit, un suivi annuel avec le cardiologue est souvent requis.
Le prescripteur établit une ordonnance à renouveler tous les ans, mais vous devez voir votre médecin traitant tous les mois pour renouveler votre traitement. Lors de ces visites, votre médecin prend votre tension, vérifie votre rythme cardiaque et vous questionne sur les effets ressentis. 
Lors de la toute première prise, votre psychiatre met en place un protocole d’adaptation sur un mois : si, par exemple, 30 mg de Ritaline sont prescrits par jour, votre dose est augmentée par paliers hebdomadaires de 10 mg, avec indications claires d’arrêter le traitement et de consulter en cas d’effets secondaires inquiétants.
Tout est minutieusement cadré. Depuis presque deux ans que je prends ce traitement, je n’ai aucune accoutumance, et les effets secondaires, légers, n'ont duré que quelques semaines avant de disparaître, une fois que mon organisme s'est adapté au traitement.

Concernant les effets secondaires, ils varient d’une personne à l’autre. Les palpitations cardiaques ne sont pas toujours provoquées directement par le médicament, mais peuvent aussi résulter d’une anxiété préexistante amplifiée (même si pas seulement dans d'autres cas). 
Il n’est d’ailleurs pas rare qu’en complément de la Ritaline, des antidépresseurs soient également prescrits dans le cadre du TDAH, car la dépression et l’anxiété font partie des comorbidités les plus fréquentes.
Certaines personnes disent que les enfants sont “zombifiés” après leur première prise de médicament. Cette impression est souvent due à un dosage trop élevé, ou à une forme de libération inadaptée à ses besoins. Dans ces cas-là, on réévalue la posologie et la forme du traitement avec le médecin.
Pour information, la Ritaline peut être prise quotidiennement ou de manière intermittente selon les besoins ; il est possible de faire des pauses de plusieurs jours sans en ressentir de manque, puisque le médicament ne provoque pas de dépendance physique.
Mes échanges avec d’autres personnes sous médication m’ont souvent faite rire, notamment face à ceux qui ignorent la réalité du traitement et croient qu’il rend “accro”. 
On est beaucoup à oublier de prendre leur médicament, et parfois même, on a la flemme.
J'ai un pilulier pour ne rien oublier, et une montre qui vibre aux heures où je souhaite prendre mon traitement.

Pourquoi autant de haine envers les médicaments qui touchent la tête ? Parce que c'est confier notre intimité profonde à un inconnu déjà remplis d'à priori et de clichés. J'ai aussi entendu les arguments comme quoi "ça détruit le foie", et "c'est mauvais pour le corps". 
Et tous ces arguments sont largement repris par les médecines alternatives
Il faut savoir que lorsque l'on prend un médicament pour améliorer sa santé, qu'elle soit physique et/ou mentale, il y a toujours une balance bénéfices / risques à prendre en compte. 
Je vais prendre mon cas personnel. Les 35 premières années de ma vie, j'ai refusé toute médication à des moments clés de ma vie où j'en aurais eu tellement besoin, tout ça parce que j'étais moi-même envahie de ces clichés infondées, en totale ignorance des protocoles scientifiques. Puis est venu l'évènement de trop dans ma vie qui ne m'a pas laissé le choix que de tenter une première expérience avec les médicaments. Personne ne m'a mis de couteau sous la gorge. Une médecin d'une extrême douceur, m'a proposé de prendre des anxiolytiques pendant plusieurs jours et de revenir la voir pour faire le point. Ce traitement éphémère m'a fait du bien. Le fait qu'il m'ait été laissé le choix de le prendre ou non a été énormément rassurant pour moi. Quand un médecin implique à 100% son patient dans un traitement, lui laissant la possibilité de choisir ou même de prendre le temps d'y réfléchir, c'est royal. 
Plus tard, pareil. Après le diagnostic du TDAH, mon psychiatre m'a parlé du traitement en me disant qu'il n'était absolument pas obligatoire ni nécessaire pour tout le monde. Je lui ai posé des milliards de questions, lui ai soumis mes doutes, mes peurs. Et il a répondu en totale transparence. 
On ne peut pas savoir tant qu'on n'essaie pas.
Ma seule peur aujourd'hui, c'est les traitements avec anti-dépresseurs mais je sais d'où vient le blocage et je veux me donner du temps avant de me lancer dans la prise du traitement. Parce que prendre un antid-dépresseur, c'est un engagement à moyen ou long terme. Et je crois que c'est ce qui me fait encore un peu peur. Pas le médicament en lui-même. Comme j'ai récemment eu le diagnostic de la maladie auto-immune de Hashimoto avec traitement à vie, j'ai besoin de temps pour m'habituer à cumuler le traitement pour ma thyroïde et pour mon TDAH. Tout est arrivé à une telle vitesse.

Depuis que je prends le methylphénidate, je me dis souvent: "Quel gâchis."
Quel gâchis que mon TDAH n'ait pas pu être diagnostiqué à mon entrée dans l'adolescence.
Quel gâchis de n'avoir pu prendre le traitement pendant toute ma scolarité, mon parcours aurait certainement été différent. Tout du moins, pas chaotique.
Quel gâchis d'avoir passé la totalité de ma vie sans aide, sans suivi adapté... 

Pour certains, le traitement ne fait rien. Pour d'autres, c'est la pilule miracle. Pour moi, c'est la petite béquille dans la gestion de mes humeurs et dans ma motivation. Les changements sont subtils, pas énormes non plus, mais suffisamment subtiles pour m'aider dans des choses insignifiantes pour vous, mais nécessaires pour moi comme: une régularité dans mes actes du quotidien, des gestes moins maladroits (coucou les verres qui se cassent tout le temps), une impulsivité maitrisée, une pensée dépressive moins permanente, une vision moins dichotomique et une fatigue moins prenante.
Chaque personne qui prend le traitement aura son expérience singulière.

Il ne faut pas associer la prise des médicaments pour les souffrances invisibles comme une marque de faiblesse comme je peux encore le lire un peu partout. 
Personne ne dirait à quelqu'un qui souffre de son cancer que la chimiothérapie, c'est de la faiblesse ! Mais ces vindicatives sont souvent la preuve d'une ignorance totale sur la réalité des troubles du neurodéveloppement ainsi que les troubles psychiques. Effet Dunning-Krueger oblige, moins on en sait sur un domaine, plus on a son mot à dire.
Oui, le sport, une meilleure alimentation et des séances psys ça aide aussi. Mais manger mieux n'éradique pas le TDAH, faire du sport ne supprime pas la dépression, et ainsi de suite. 
C'est peut-être la somme de toutes ces choses qui permet d'aller un tant soit mieux. 
Si j'avais un conseil à donner aux personnes qui se questionnent sur le traitement pour le TDAH, c'est de ne surtout pas chercher de témoignages sur les réseaux et de poser un maximum de questions à la personne qui prescrit le médicament... et ne surtout pas écouter les partisans des médecines alternatives, comme je le précise bien dans un de mes articles: 
Santé mentale, TDAH et pseudosciences : pourquoi l’esprit critique est vital.

Malheureusement, vous verrez des témoignages bien plus flippants que rassurants. Et ça vous fera oublier que pour le traitement au méthylphénidate, comme pour n'importe quel autre traitement, chaque personne aura des réactions et effets secondaires différents. Le tout, c'est de s'informer, faire confiance aux praticiens spécialisés. Oui, beaucoup de psychiatres et de psychologues ne croient pas aux troubles du neurodéveloppement et peuvent parfois répandre eux-mêmes des inepties. Mais quand on est dans le doute, il ne faut pas hésiter à se tourner vers des associations du type Hypers Supers TDAH, consulter la HAS et poser des questions à son médecin. Et on développe aussi son esprit critique sur les pseudosciences


Pour aller plus loin:

° Guide sur le traitement du TDAH par méthylphénidate:
https://tdah-age-adulte.fr/guide-methylphenidate/

° Déceler les dérives sectaires dans les médecines alternatives et autres pseudosciences:
https://www.miviludes.interieur.gouv.fr/

° Enquête sur ce pourquoi certaines personnes arrêtent leur traitement au méthylphénidate:
https://tdah-age-adulte.fr/resultats-de-lenquete-sur-larret-du-traitement-pour-le-tdah/

° TDAH, mythe ou réalité:
https://tdah-age-adulte.fr/tdah-mythe-realite/



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